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Entretien avec Frédéric
ENCEL, docteur en géopolitique, consultant et expert
en risques-pays, professeur de relations internationales
à l'ESG-Paris, maître de séminaires
à Sciences-Po Rennes (préparation ENA), auteur
de sept ouvrages consacrés à la géopolitique
et au Moyen-Orient. |
Un scrutin
législatif capital se tiendra en mars 2006 en Israël,
vers quelle formation politique devrait pencher la nombreuse
population russophone du pays ?
Frédéric ENCEL : Au commencement de la grande
vague d'immigration des années 1989-92, les citoyens
fraîchement parvenus d'ex-URSS se sont globalement répartis
sur l'ensemble des formations sionistes laïques, autrement
dit le parti travailliste, le Likoud, et le parti de l'ancien
refuznik Nathan Sharansky.
Mais depuis le scrutin de 1996 au moins, on a assisté
à un glissement vers la droite, surtout aprs le déclenchement
de la guerre israélo-palestinienne (ou seconde Intifada)
en septembre 2000. Je dirais que cette fois, à l'instar
de beaucoup d'Israéliens plutôt laïcs et plus
ou moins centristes, les Russes apporteront leur confiance au
tandem Sharon/Péres.
L'ultra-libéralisme d'un Netanyahou
et le syndical-populisme d'un Peretz
du reste ne devraient guère les séduire.
Globalement, l'immigration russe massive des années 1990
a-t-elle été un atout ou un handicap pour Israël
?
Frédéric ENCEL : Ce fut et demeure, en dépit
de problèmes d'intégration sociale et culturelle,
un formidable accélérateur de puissance : sur
le plan démographique bien sûr, mais aussi sur
le plan stratégique (avec des milliers d'ingénieurs
performants), ainsi qu'au niveau économique ; l'immigration
russe a contribué à propulser la croissance israélienne
grâce notamment au logement et aux biens de consommation
courante. Enfin ne négligeons pas l'aspect moral et psychologique
: le retour "au pays" de près d'un million
de Juifs qui auraient pu choisir d'autres destinations, a convaincu
les Israéliens que l'idéal sioniste demeurait
vivace, et que les "réservoirs" d'aliyot (immigrations
vers Israël) existaient encore.
Où en sont les
relations israélo-russes ?
Frédéric ENCEL : A en juger par le succès
de la visite d'Etat sans précédent d'un dirigeant
russe et/ou soviétique en Israël, en l'occurrence
celle de Poutine
en 2005, les rapports sont chaleureux. Mais c'est surtout sur
le plan des échanges commercieux qu'on mesure la qualité
d'une relation bilatérale. Or le volume d'échanges
entre Moscou et Jérusalem ne cesse de croître depuis
dix ans environ. J'ajoute qu'Israël entretient aussi de
bons rapports, bien qu'à des degrés divers, avec
l'ensemble des républiques ex-soviétiques, comme
l'Azerbaïdjian. Au fond, le seul véritable contentieux
concerne la nucléarisation de l'Iran, qui ne peut s'opérer
qu'avec le concours de la Russie. Mais dans quelques mois, cette
affaire sera réglée...
Propos recueillis par David Chelly, le 16 décembre 2005
Plus d'informations :
Frédéric
Encel, Expert en risque-pays
http://www.fredericencel.org |
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